Rejet d’un nouvel amendement sur le cannabis au Sénat

amendement du sénat cbd novembre 2024

Le 21 novembre 2024, le Sénat français a rejeté un amendement écologiste visant à introduire une accise (taxe spécifique) sur le cannabis et ses produits. Ce projet, présenté dans le cadre du Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) pour 2025, ambitionnait de réguler le marché du cannabis, d’affecter les recettes générées à des actions de prévention et de renforcer la branche « maladie, maternité, invalidité et décès » de la Sécurité sociale. Revenons en détail sur le contexte, les objectifs de cet amendement, les arguments avancés, et les implications de ce rejet.

Un contexte préoccupant pour la santé publique

Malgré une législation parmi les plus répressives d’Europe, la France reste un consommateur important de cannabis au niveau européen, notamment chez les jeunes.

La prohibition actuelle, qui repose sur une répression accrue, a montré ses limites. Le marché noir continue de prospérer, exposant les consommateurs, notamment les plus jeunes, à des produits non régulés et potentiellement dangereux. Dans ce contexte, l’amendement proposait une approche différente, inspirée des politiques appliquées à l’alcool et au tabac.

Les objectifs de l’amendement : une accise pour la prévention

L’amendement écologiste visait à créer une taxation spécifique sur le cannabis, appelée accise, intégrée dans le Code de l’Imposition des Biens et Services (CIBS).

Comprendre les termes : une accise est une forme de taxation indirecte, souvent calculée sur la quantité (par exemple, au poids ou au volume) ou sur la valeur d’un produit.

Dans ce contexte, l’objectif était de taxer le cannabis pour :

  • Encourager une consommation responsable en augmentant son coût, rendant l’accès plus réfléchi, notamment pour les jeunes
  • Générer des recettes fiscales pour financer des initiatives publiques, ici en faveur de la Sécurité sociale et des actions de prévention, en apportant une nouvelle source de revenus à la branche « maladie, maternité, invalidité et décès »
  • Réduire les impacts négatifs du marché noir et réguler le marché légal du cannabis en incluant une contribution obligatoire pour les acteurs économiques, à l’image des taxes imposées aux fabricants et distributeurs d’alcool ou de tabac

L’exemple avancé était celui des États-Unis, où la légalisation dans plusieurs États a généré 15 milliards de dollars de recettes fiscales entre 2014 et 2022. En France, une étude du Conseil d’Analyse Économique (2019) estimait que la légalisation du cannabis pourrait rapporter jusqu’à 2,8 milliards d’euros par an.

Cela s’inscrit dans une logique de régulation économique et de santé publique, visant à encadrer le marché tout en tirant profit des revenus pour des objectifs collectifs.

Un rejet massif au Sénat

Malgré ces arguments, l’amendement a été largement rejeté par le Sénat, avec 261 votes contre et seulement 16 en faveur. Les opposants mettent en avant plusieurs arguments pour soutenir ce rejet :

  1. Une opposition idéologique : certains sénateurs restent fermement opposés à toute forme de légalisation, considérant que cela enverrait un message contradictoire vis-à-vis des efforts de prévention.
  2. Des craintes sanitaires et sociétales : même si l’amendement mettait l’accent sur la prévention, l’idée de légaliser le cannabis soulève encore des inquiétudes quant à l’augmentation potentielle de sa consommation.
  3. Un attachement au modèle actuel : la répression reste la stratégie privilégiée en France, malgré les critiques croissantes de son inefficacité.

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Les réactions : immobilisme ou prudence ?

Ce rejet a suscité des réactions contrastées. Les défenseurs de l’amendement dénoncent un immobilisme face à une situation qui échappe à tout contrôle. Selon eux, maintenir la prohibition revient à enrichir les réseaux criminels, gaspiller des ressources publiques dans des politiques inefficaces, et exposer les jeunes à des produits non régulés.

D’autres, en revanche, défendent le statu quo, estimant que la légalisation pourrait avoir des effets pervers, notamment une banalisation de la consommation et une pression accrue sur les systèmes de santé.

Quels enseignements pour l’avenir ?

Le rejet de cet amendement reflète les résistances qui subsistent face à une évolution législative sur le cannabis en France. Néanmoins, ce débat met en lumière plusieurs points cruciaux :

  • La nécessité de repenser les politiques de lutte contre les addictions : le tout-répressif a montré ses limites, et des solutions alternatives, incluant la prévention et la régulation, méritent d’être explorées.
  • Un enjeu économique et sanitaire majeur : une légalisation bien encadrée pourrait générer des revenus importants tout en réduisant les risques sanitaires associés au marché noir.
  • Une attente croissante de la société civile : à l’international, de plus en plus de pays adoptent des politiques de légalisation ou de dépénalisation. En France, l’opinion publique semble également évoluer sur ce sujet.

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Cannabis et CBD : une distinction nécessaire

Dans ce débat, il est important de distinguer le cannabis récréatif, contenant des niveaux élevés de THC (molécule psychoactive), du CBD (cannabidiol), qui n’a pas d’effet psychotrope et est légal en France. Le CBD est souvent utilisé pour ses propriétés relaxantes et thérapeutiques, et fait l’objet d’un cadre réglementaire spécifique. Alors que l’amendement portait exclusivement sur le cannabis au sens large, le rejet peut aussi semer la confusion sur le CBD, pourtant bien distinct et légal.

Si la voie de la légalisation reste un sujet sensible, il apparaît nécessaire de continuer à débattre de solutions innovantes pour répondre aux enjeux de santé publique, de sécurité et de finances. Dans ce contexte, il est primordial de clarifier et promouvoir une distinction entre cannabis récréatif et CBD, afin de ne pas freiner l’émergence de produits légaux et potentiellement bénéfiques.

Le CBD : une alternative crédible au cannabis récréatif

Le CBD (cannabidiol) constitue une alternative intéressante au cannabis récréatif pour plusieurs raisons. Contrairement au THC, principal composé psychoactif du cannabis, le CBD n’entraîne ni effet psychotrope ni dépendance. Ses propriétés relaxantes et thérapeutiques en font un produit adapté pour des usages variés, tels que la gestion du stress et de l’anxiété, l’amélioration du sommeil ou le soulagement de douleurs chroniques.

Légal en France sous certaines conditions (un taux de THC inférieur à 0,3 %), le CBD bénéficie d’un cadre réglementé qui garantit la sécurité et la qualité des produits. Cela permet de proposer une alternative encadrée pour les consommateurs, éloignant ainsi certains d’entre eux du marché noir ou d’un usage abusif de cannabis à forte teneur en THC.

En parallèle, le CBD pourrait jouer un rôle dans la prévention des risques associés au cannabis récréatif. En offrant une option légale et non addictive, il peut aider les consommateurs à réduire leur exposition aux produits non régulés et aux dangers qu’ils comportent. Enfin, le développement du marché du CBD représente une opportunité économique, avec des retombées fiscales et la création d’emplois, tout en sensibilisant le public aux différences entre THC et CBD pour une consommation mieux informée et responsable.